20-07-2025 23:27 - Diplomatie mauritanienne: Accords d’Abraham ou Groupe de La Haye, quel camp choisir ?

La Dépêche - Alors que les lignes diplomatiques se redessinent à l’échelle mondiale, notre pays semble pris entre deux feux : rejoindre les Accords d’Abraham, initiés par l’administration Trump en 2020, ou se rapprocher du « Groupe de La Haye », tout récemment créé pour défendre un ordre international fondé sur le droit.
Il convient d’abord de rappeler que la société mauritanienne, dans sa très large majorité, rejette toute idée de normalisation des relations du pays avec l’actuel gouvernement israélien. La multiplication des manifestations anti-israéliennes dans le pays le traduit bien. Ce refus repose non seulement sur l’absence de perspectives de paix durable, mais aussi sur les violences largement documentées exercées contre les civils palestiniens.
Un génocide évident pour les mauritaniens et plus largement encore pour les opinions publiques mondiales. Les poursuites judiciaires de la CPI contre le premier Ministre israélien, B. Netanyahou (et Y. Gallant) sont encore une preuve des crimes fumants des extrémistes juifs israéliens.
Cependant, Nouakchott entamé, au début du processus, et sous l’influence des Émirats arabes unis des discussions en vue d’une éventuelle adhésion aux Accords d’Abraham. La Mauritanie était ainsi invitée à prendre le train en marche d’une initiative, lancée le 15 août 2020, qui a vu la signature d’un accord tripartite entre les Émirats, Bahreïn et Israël, sous l’égide de Donald Trump.
L’objectif affiché par les USA était de restructurer les alliances au Moyen-Orient, mais dans les faits, ces accords ont été perçus –avec le recul- par les pays arabo-musulmans comme un contournement du consensus arabe autour de la cause palestinienne et au détriment du processus de paix issu des accords d’Oslo.
Par ailleurs, une autre justification aux accords d’Abraham serait l’alliance de ces pays dans un front commun anti-Iran, alignant plusieurs monarchies du Golfe avec les intérêts stratégiques d’Israël et des États-Unis. Dans le contexte actuel – marqué par les événements du 7 octobre 2023 et la répression brutale qui s’en est suivie à Gaza – toute tentative de normalisation serait politiquement risquée pour le gouvernement mauritanien, face à une opinion publique, dans son propre camp, profondément solidaire du peuple palestinien.
C’est dans ce climat qu’est intervenue une autre alternative : le Groupe de La Haye, fondé en janvier 2025 en réponse au recul du multilatéralisme et à l’affaiblissement du droit international. Rassemblant 32 États de toutes les régions du monde, ce groupe entend réaffirmer la primauté du droit face aux logiques de puissance. Pourtant, la Mauritanie ne s’est pas encore positionnée clairement sur son éventuelle adhésion, ni n’a réagi à sa création.
Le dilemme pour le gouvernement reste donc entier: s’arrimer à une dynamique géopolitique controversée, au risque de se mettre à l’opinion nationale ? Ou rejoindre une initiative internationale qui tente de remettre le droit au cœur des relations entre États, mais dont les équilibres restent encore fragiles ?
Le choix, en apparence cornélien, pourrait être moins complexe si la diplomatie mauritanienne écoutait les aspirations profondes des mauritaniens et ses propres convictions à elle.