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SAMIA : Des travailleurs accusent l’entreprise de «corrompre ses partenaires extérieurs»
A en croire certains de ses employés, la SAMIA organise la corruption, pour s’éviter des «ennuis» avec ses «partenaires extérieurs». Les travailleurs fondent leurs accusations sur un document adressé, par le conseiller de gestion, au directeur de la société. Dans cette correspondance en date du 9 septembre 2012, dont Le Calame a reçu copie, ledit conseiller, qualifié, par les travailleurs, d’«homme-à-tout-faire du DG» écrit :
«pour me permettre de gérer tout ce monde, je souhaiterais bénéficier d’une dotation supplémentaire en carburant et d’une enveloppe trimestrielle de deux cents mille ouguiyas ».
Par « tout ce monde », il faut entendre, comme le mentionne expressément le document, le receveur de la CUN, la brigade de Gendarmerie de Nouakchott, la Direction de la Pollution et urgences environnementales, la Direction des impôts, la compagnie militaire située non loin de l’usine, l’Inspection du travail et certains douaniers.
« Tout ce monde a l’habitude », poursuit la correspondance, « de recourir directement à moi pour régler certains problèmes ponctuels ». Le conseiller chargé du contrôle de gestion attire l’attention de son directeur sur le fait que « les maigres moyens que [celui-ci] mettait à sa disposition ne suffisent plus à satisfaire les nombreuses sollicitations des partenaires », au point qu’il soit obligé d’utiliser sa « propre dotation en carburant ».
Les annotations portées sur la correspondance du conseiller, déjà à la retraite mais retenu, selon nos interlocuteurs, pour « les besoins de son boss », laisseraient à penser que la requête aurait été acceptée, parce qu’on y lit, « m’en parler », d’abord ; « c/SAF/CCG Accord », ensuite ; puis, « faire un chèque de 200 000 UM, le 1er mars 2012 » et, enfin, « carburant : 60 000 UM ».
Les travailleurs qui se plaignent de leur « situation difficile » protestent contre cette corruption organisée, par l’entreprise, au prétexte qu’elle « opère dans un environnement assez trouble qui nécessite un recours, assez fréquent, auprès de nos divers partenaires de la place », renseigne la note.
Ils s’étonnent de voir une société se livrer à la « corruption des fonctionnaires de l’Etat », alors même qu’elle est bannie par les pouvoirs publics. Ils se demandent s’il ne s’agit pas, là, d’une « manière détournée de piquer dans la caisse de l’entreprise », pendant que le directeur « refuse, aux employés, gratifications et prêts.
Nous n’avons plus le 13ème mois. Lors de la dernière fête de Tabaski, nous n’avons reçu qu’une modique somme de 11 000 UM chacun, alors que les partenaires extérieurs ont bénéficié chacun de 80 000 UM », déclare un de nos informateurs. Et un autre d’ajouter : « depuis son arrivée à la tête de l’entreprise, le DG recrute, à tour de bras, ses parents alors que l’entreprise n’en pas besoin ».
Les employés traitent leur patron de « mauvais manager, hostile à tout contact ou familiarité avec ses employés ». Dans une note de service en date du 14 mars 2013, avec ampliation à l’inspection du Travail, UTM et CLTM, le directeur a pris des mesures restreignant et interdisant les mouvements, les contacts, les attroupements et les retards. La porte d’accès sera, désormais, fermée à 8h 45 mn pour ne se rouvrir qu’à 16 h.
Pire : « il n’est plus permis de contacter le Directeur Général durant ses heures de visite à l’usine » et « […] Tous les agents qui porteront préjudice au bon fonctionnement et aux intérêts de l’entreprise seront immédiatement licenciés » Le directeur trouve inadmissible que des «attroupements et autres errements continuent à persister au sein de l’entreprise ».
On comprend que, dans ces conditions, le partenariat avec l’inspection du Travail soit particulièrement financé… Contactée par Le Calame, la SAMIA avait promis de nous donner sa version. Sans suite.